Par Pierre-Brice Levy,
Conseiller Numérique France Services et Promeneur du Net Parentalité.
Illustrations corps article : Commission Tik Tok ; source : Compte Instagram @severine.erhel
Illustration Vignette générée avec Chat-GPT
Je dois vous avouer que le débat actuel sur une nouvelle réglementation concernant l’accès des jeunes de moins de 15 ans aux réseaux sociaux m’intéressait peu.
Il y a encore quelques années, je pensais qu’une éducation aux médias croisée à un effet d’expérience pouvait suffire pour décourager quiconque de continuer à perdre son temps sur les mauvais réseaux où du moins, sur des usages toxiques* de ces réseaux.
Mauvais ou Toxiques, je disais que c’était à chacun d’en juger lesquels, pensant que chacun serait capable d’en mesurer le déficit ou les risques.
Aujourd’hui, j’ai plus de données, car des experts ont étudier objectivement certains réseaux et usages. Ces données me permette de faire la prévention, mais je suis de plus en plus loin de comprendre les nouvelles mécaniques à l’œuvre dans les fils de recommandation (Voir dossier Le Monde sur le scandale des « Facebook files« ). Ces nouveaux algos, qui choisissent le contenu auxquels nous sommes exposés me semblaient certes plus manipulateurs mais ne me semblaient pas plus dangereux pour autant.
En comparaison avec l’expérience du feu qui brule ; celle-ci est toujours tentante pour un enfant qui a uniquement la connaissance théorique de la brulure. Il va toucher la flamme et vite retenir la leçon.
Une leçon apprise par la flamme, qui pourra servir pour d’autres objets brulants ou incandescents.
Et qui lui servira aussi de leçon pour faire confiance et accepter les conseils que les personnes plus expérimentées lui promulguent.
C’est un peu comme ça que je voyais la toxicité des réseaux : un moyen non subtile et non supervisé d’apprendre des dangers d’internet et des relations sociales avec des inconnus.

Cependant, j’oubliais au moins une chose importante : le besoin de validation extérieure (ou externe).

Ce besoin, c’est ce qui fait qu’un certificat médical est demandé pour participer à certaines activités sportives. Avant cela, des athlètes se mettaient régulièrement en danger en participant à des épreuves alors que leur corps ne le supportait pas ou que cela réduisait considérablement leur capacité de réathlétisation après un accident.
La validation extérieure nous pousse à minimiser les risques alors même que nous les mesurons pour aboutir à des objectifs qui semblent plus importants, qui dépassent notre condition d’individu responsable.
Les connaissances et la raison sont donc mis à défaut, pour privilégier des émotions, le développement de sa confiance en soi ou de son intégration à un groupe.
Ces derniers semblant donner du sens à notre vie, ils supplantent la connaissance dans nos choix et décisions.
L’homo économicus parfaitement rationnel est un mythe réduit à un simple outils de modélisation de l’économie. Expliquer des comportements déviants par un manque d’éducation est contraire aux consensus que la recherche scientifique a produit en sciences sociales et en sciences cognitives ces 50 dernières années.
La validation externe permet un niveau explicatif hybride entre ce qui se passe dans le cerveau et ce qui se passe dans l’environnement.
En effet, dans notre société de 2025, la quête de validation extérieure est un moteur psychologique si puissant qu’elle impose quelque part l’usage des réseaux sociaux.
Avec leur massification, ne pas y participer équivaut à une forme d’invisibilité sociale ou professionnelle. Les plateformes exploitent ce besoin fondamental de validation externe en fournissant des outils d’expression et de communauté qui sont, en réalité, des arènes de performance identitaire.
Chaque individu y soumet son image et ses opinions au jugement constant d’autrui, cherchant l’approbation (likes, partages) au sein de ses bulles cognitives qui valident et amplifient ses propres croyances.
Et ceci est valable pour les producteurs de contenu comme pour les consommateurs de contenus : la vue d’un like sur un commentaire ou une publication d’un autre, tel que que nous aurions pu écrire (c-à-d dont nous partageons l’essence) entraine la même validation.
Dans ce contexte, la raison et la connaissance des risques (anxiété, addiction, polarisation) deviennent impuissantes face à la récompense émotionnelle immédiate d’un « like » et à la peur viscérale de l’exclusion.
La simple question « t’as pas la ref ? » peut renvoyer à un sentiment d’exclusion, de solitude ou d’avoir manqué par son absence sur les réseaux ou par une déconnection temporaire, une information qui définit culturellement le groupe.
La déviance (imaginons qu’ils connaissent les risques) n’est alors pas une exception mais une conséquence logique : chaque individu, même informé, est poussé à prioriser sa validation numérique, car le système social lui-même est construit pour que son bien-être psychologique à court terme en dépende.


Aujourd’hui, je pense que se concentrer sur l’éducation et la responsabilité individuelle est une approche quasi inefficace, voire une erreur d’analyse. Lorsque le problème est de nature systémique et environnementale, l’individu n’est pas le responsable de ses actions.
Ne blâmer pas le joueur, blâmer les règles du jeu.
Développons en premier lieu deux analogies : celle de la lutte contre le tabagisme et celle des embouteillages routiers (Nldr : J’aurais également pu prendre l’exemple de la lutte contre le réchauffement climatique, cf. vidéo du neuroscientifique Moukheiber sur la chaine Youtube « Ethique et Tac » qui m’a inspiré cet article ).
Puis, à partir des enseignements de ces analogies, nous relativiserons un peu. SPOIL, ces analogies montrerons que pour ces sujets, il est inutile d’opposer éducation et règlementation. Mais c’est peut-être pas cette question la plus importante mais l’existence d’un débat, d’une réflexion, de consensus dans le constat, et la démarche qui amènerait peut être à un consensus sur le principe.
Est-ce qu’il est tolérable de limiter ou d’interdire l’accès des jeunes aux plateformes de réseaux sociaux ? Quels sont les critères qui permettraient de cataloguer une plateforme comme malveillante ou néfaste ? Les adultes ont-ils le devoir de garantir aux plus jeunes des espaces d’échanges fiables et sûrs ?
1. L’Analogie du Tabac : L’Insuffisance de la Prévention face à l’Environnement
L’exemple du tabac est particulièrement éclairant pour distinguer deux niveaux d’action : celui qui vise l’individu et celui qui modifie l’environnement.
- L’approche par l’éducation et la prévention : Pendant des décennies, la lutte contre le tabagisme s’est concentrée sur l’information. Des messages comme « Fumer tue » sur les paquets, des campagnes de sensibilisation sur les risques de cancer, des interventions dans les écoles… L’objectif était de rendre chaque individu conscient des dangers pour qu’il fasse le « bon choix » de ne pas commencer ou d’arrêter.
- Résultat : Si cette prévention est nécessaire, elle a montré ses limites. Le nombre de nouveaux fumeurs, notamment chez les jeunes, peinait à baisser significativement. Pourquoi ? Parce que l’individu, même éduqué, évoluait dans un environnement où fumer était normalisé, socialement valorisé et rendu facile d’accès. La pression sociale et la puissance addictive de la nicotine l’emportaient souvent sur la raison.
- L’approche par la contrainte environnementale : Le tournant majeur a été l’interdiction de fumer dans les lieux publics (bars, restaurants, lieux de travail). Cette mesure n’a pas « éduqué » le fumeur, elle a changé l’environnement dans lequel il évolue. Associer à une taxation croissante, fumer est devenu plus compliqué, moins social, et l’acte de sortir pour fumer a matérialisé sa singularité. Cette « dénormalisation » a eu un impact bien plus fort sur la baisse du tabagisme que des décennies de prévention seule. Surtout, sur les taux de nouveaux fumeurs.
Application aux réseaux sociaux : Demander aux parents de « mieux surveiller » et aux adolescents de « s’autoréguler » face aux réseaux sociaux, c’est l’équivalent de la simple prévention sur le tabac.
On place la charge mentale et la responsabilité sur des individus face à un système (les plateformes) conçu par des milliers d’ingénieurs pour être le plus captivant et addictif possible (la « nicotine numérique »).
Une mesure structurelle, comme une interdiction ou une régulation forte de l’accès avant un certain âge, s’apparenterait à l’interdiction de fumer dans les lieux publics : elle changerait l’environnement, réduirait la pression sociale (« tout le monde y est ») et protégerait les jeunes durant leur période de plus grande vulnérabilité.
2. L’Analogie des Embouteillages : Le Mauvais Niveau d’Analyse
Cette seconde analogie illustre pourquoi le problème est mal posé lorsqu’on le réduit à une somme de décisions individuelles.
- L’approche par la responsabilité individuelle : Face à un embouteillage monstre, il serait absurde d’expliquer le problème en se focalisant sur chaque conducteur. Dire que « si chaque personne décidait de ne pas prendre sa voiture, il n’y aurait pas de bouchon » est une évidence stérile. Personne ne prend sa voiture pour créer un embouteillage.
- L’analyse systémique et environnementale : Le véritable niveau d’explication est structurel. Les embouteillages sont le symptôme d’un système : l’urbanisme (étalement urbain), le manque d’alternatives de transport en commun efficaces et abordables, la culture de la voiture individuelle, l’organisation du travail (horaires de bureau standardisés), etc. C’est l’environnement qui contraint le choix de l’individu.
- La solution : La solution n’est pas de faire la morale aux automobilistes, mais d’agir sur le système : investir dans les métros et les pistes cyclables, promouvoir le télétravail, repenser l’aménagement du territoire.
Application aux réseaux sociaux : De la même manière, blâmer les parents qui « cèdent » en donnant un smartphone ou les adolescents qui y passent « trop de temps » revient à blâmer l’automobiliste coincé dans le trafic. Les jeunes ne se ruent pas sur les réseaux par vice, mais parce que l’écosystème social et scolaire les y pousse :
- Besoin sécuritaire : Etre accessible pour rassurer les autres, suivre les autres pour se rassurer, pouvoir informer de tout aléa, tout de suite, et constamment.
- Pression sociale : La peur de l’exclusion (le fameux FOMO – Fear Of Missing Out) est un moteur puissant. Le groupe de la classe s’organise sur WhatsApp ou Snapchat.
- Manque d’alternatives : Les espaces de socialisation non-marchands et non-supervisés pour les adolescents se sont raréfiés dans l’espace public.
- Conception des plateformes : Les algorithmes sont optimisés pour maximiser le temps d’écran.
L’enjeu n’est donc pas de pointer du doigt la « faute » individuelle, mais de reconnaître que l’environnement numérique actuel crée un « embouteillage attentionnel » quasi inévitable pour les plus jeunes.
Tout comme les automobilistes ne prennent pas leurs voitures pour créer des bouchons, les publicateurs de contenus ne publient pas pour malmener les utilisateurs les plus fragiles. Cela peut être un moyen pour les charlatans certes, mais ce n’est jamais le but premier.
Excipit
En résumé, ces analogies démontrent que le débat « éduquer contre interdire » est souvent un faux-dilemme, lorsque le mal est une construction collective.
L’argument n’est pas que l’éducation est inutile, mais qu’elle ne peut pas être la pierre angulaire de la stratégie sur du court terme.
Un autre exemple ?
On ne peux pas expliquer que le manque d’éducation crée les problèmes observés, comme on ne peut pas expliquer que la connaissance des bienfaits du quinoa a crée l’augmentation mesuré et récente de sa consommation.
Par ailleurs, pour le Quinoa, c’est plutôt l’inverse qui s’est produit, les gens l’ont consommé par opportunité et ont eu ensuite la validation que c’était bon pour eux, forçant une forme de renforcement de cette nouvelle habitude, favorisant les autres de l’essayer (viralité).
Traiter un problème collectif et systémique par la seule responsabilité individuelle est une forme de déni qui arrange ceux qui ont des intérêts (dans l’industrie liée, dans l’individualisme ou le remplacement du pouvoir public par des pouvoirs privés). Tout comme les cigarettiers ont longtemps promu la « liberté de choix » et les constructeurs automobiles la « responsabilité du conducteur », les géants du numérique mettent en avant « l’éducation au numérique » et le « contrôle parental ». C’est un glissement de la responsabilité qui les exonère de la leur.
La question pertinente n’est donc pas « faut-il éduquer les jeunes ? », car la réponse est évidemment oui.
La véritable question est : « Comment modifier l’environnement numérique pour que cette éducation ait une chance de porter ses fruits et pour que les plus jeunes soient structurellement protégés ? »
Dans cette perspective, une régulation ou une interdiction pour les plus jeunes apparaît moins comme une privation de liberté que comme une mesure de santé publique, au même titre que la régulation du tabac ou la planification urbaine.
Enfin, si le législateur, constatant les dangers systémiques (désinformation, problèmes de santé publique, polarisation menaçant la démocratie), impose un cadre réglementaire strict ou une interdiction de certaines pratiques, il agit comme un puissant catalyseur d’innovation.
En rendant le modèle économique actuel — fondé sur l’économie de l’attention, l’opacité des algorithmes et la viralité à tout prix — juridiquement risqué ou non/moins rentable, il ne tue pas le marché, il le réoriente.
Cette contrainte force les acteurs économiques à concevoir de nouvelles plateformes dont la viabilité ne repose plus sur la manipulation.
Pour survivre et conquérir des parts de marché dans ce nouvel environnement, les entreprises seraient incitées à développer des solutions vertueuses : des modèles d’affaires alternatifs comme l’abonnement, qui aligne les intérêts de la plateforme avec ceux de l’utilisateur ; une réduction drastique de la dissymétrie d’information ; et l’intégration par défaut de systèmes de vérification des faits et d’une modération intransigeante de la haine, non plus comme un coût à minimiser, mais comme un avantage compétitif et une obligation légale.

Bien sûr, le débat est bien plus complexe, car derrière le constat et la théorie (le pourquoi), la pratique (le comment) est complexe :
- des lois et décrets réglementent déjà les plateformes et l’usage de celle-ci par les enfants,
- authentifier l’âge d’un utilisateur de manière sûr et obligatoire amène de nombreuse questions éthiques et techniques,
- la difficulté d’anticiper les retours de bâton que produirait une interdiction : tel qu’encourager le recours au darknet, inciter au piratage à à la revente de comptes certifiés « adulte », la falsification des pièces d’identités, un sentiment fort d’opposition aux institutions politiques, etc.
- le besoin de définir clairement qu’est-ce qu’un réseau social toxique pour les enfants, pour quel usage, quel dose, etc. Par exemple; selon la définition choisie, Wikipédia pourrait être vu comme un réseau social, tout comme des forums d’entraide (develloppez.com par exemple) ou de SAV (le SAV de nombreux jeux vidéo et logiciels s’organise désormais sur Discord).
Je ne suis pas pour l’interdiction en général, je crois en l’éducation sur le long terme, si ce n’est pour changer les comportement, au moins pour éclairé l’individu. Mais parfois, pour sortir de certaines dynamiques collectives, l’éducation ne permet pas seule une rupture qui force un changement de comportements efficacement.
Si interdire est une fausse bonne idée, renoncer à réfléchir aux compromis éthiques et possibles solutions techniques en vue d’une régulation par décret me semble être une fausse mauvaise idée.
Trouver un accord de principe avant d’étudier un accord de moyen !
Envisager le comment, les moyens et les répercussions, comme je l’ai fait dans la liste à puces précédente et au dessus, avant de définir, de comprendre et d’accepter quel principe serait nécessaire me semble dangereux. Les analogies précédentes ont permis de montrer qu’une privation des liberté pouvait être bénéfique. Mais les analogies ont leurs limites, un puissant consensus de principe sur un sujet s’obtient en parlant directement du sujet.
Cherchons collectivement le compromis en vue d’une réglementation efficace sur le plan éthique avant de chercher comment, d’un point de vue juridique ou technique, ce compromis pourrait être mis en place.
Clairement, s’étendre sur le comment avant de s’assurer de l’efficacité et de la légitimité du pourquoi entrave notre capacité à réfléchir, notament sur la vie collective. C’est une rhétorique manipulatrice bien connue pour conserver un statuquo : « Ne cherchez pas de solution, car aucune n’est possible à mettre à mettre en place ». Et aussi bien connu des commerciaux : « Vous ne désirez pas ce produit, imaginez comment il serait adéquat dans votre salon ? » « Vous trouvez ce produit beaucoup trop cher pour vous ? Imaginons des solutions pour le financer ».
Et pourtant c’est parfois bon d’être pragmatique. Cela permet de traiter un problème rapidement, mais certaines choses méritent que l’on prenne le temps. L’urgence et la panic morale qui se s’épanouissent dans les propos réactionnaires empêchent également la réflexion. Non, ce n’était pas mieux avant, c’était différent !
Alors, est-ce un sujet aussi important qu’il le parait ?
Cela, ce n’est pas à moi d’en juger.
Je peux simplement constater que les médias et les politiciens y voient un sujet de société, que des spécialistes en font commerce (livres, formations), que la recherche est financé et que tout cela alimente le débat.
Des sondages semblent mettre en évidence des problèmes mais chaque étude statistiques a ses biais que je ne suis en capacité d’analyser, de vérifier, de corriger.
Puis, comment mesurer que le potentiel des jeunes est altérée sans connaitre l’avenir qui leur sera réservé toute chose étant égale par ailleurs ?
Le capitalisme transforme les outils de production et les produits de manière à maintenir l’inclusion des travailleurs et des consommateurs. En tirant le trait, est-ce que ne plus savoir lire ou compter est une perte si des outils et services compensent cette perte ?
Une compétence issue du progrès technique en chasse une autre
De tout temps, la technologie a profondément remodelé le « socle commun » des compétences que chaque individu était censé maîtriser. Plusieurs aptitudes, autrefois essentielles et universellement enseignées ou transmises, sont aujourd’hui devenues secondaires, voire inutiles, pour une grande partie de la population (ex : calcul mental complexe, sténographie, utilisation de la nomenclature Classification décimale de Dewey, gravure sur pierre, élevage de pigeon voyageur, entretien des écuries et des chevaux etc. ).
Mon arrière grand-père disait, pour traiter du déclin des compétences (et du drame écologique), que tout était déjà joué dès lors que l’environnement (légale, technique, économique, social) a permis à chacun de posséder son propre taille-et-crayon.
Je trouve que cet exemple montre une montée des libertés de l’individu au détriment de ses compétences. Car auparavant, on formait les écolier à utiliser un couteau pour tailler son crayon et faire bien d’autres choses avec (à commencer par la responsabilité de détenir un couteau, de l’entretenir, etc.).
C’est évident que pour les personnes qui ont vécu le bénéfice de certaines compétences, les voir disparaitre ou être substituer forme une inquiétude sur les générations futures.
Pour les personnes nées dans les années 80 comme moi, c’est l’obsolescence de la mémorisation encyclopédique de faits qui inquiète. Apprendre par cœur de longues listes de dates, de capitales, de données factuelles ou de formules était un pilier de l’éducation, du mérite et de la reconnaissance. L’accès instantané à l’information via les moteurs de recherche a déplacé la compétence de la « mémorisation » vers la « recherche, le tri et la validation » de l’information. Et L’IA vient maintenant remplacer ces compétences de recherche et de tri par une curiosité intellectuelle, un esprit critique et une rhétorique adaptée.
Le cerveau n’est pas qu’une somme de compétences intellectuelles et de connaissance, c’est aussi le berceau et le lit de nos émotions.
Si je peux en quelques mots balayer l’argument du déclin des compétences des jeunes à cause d’usages du progrès technologique. Il sera pour moi bien plus difficile d’ignorer les études scientifiques montrant que la technologie peut apporter des émotions négatives et modifier les mécanismes de récompenses hormonales de façon durable.
Cependant même s’il m’est impossible de l’ignorer, j’ai un petit peu du mal à en tenir compte en tant que niveau explicatif du mal être de certains adolescents.
Certes l’usage de ces technologies de manière abusive comporte des risques mais qu’est ce qui pousse les adolescents à aller sur des usages abusifs ?
On en revient aux sujets traités en premier dans cet article à savoir : l’environnement, l’effet de groupe, l’économie de l’attention et la validation extérieure.
La première raison évoquée par les jeunes pour expliquer un certain mal être ou une dépression est la famille dysfonctionnelle, la seconde est la pression scolaire. Le digital arrive souvent en 4eme position.
La phobie technologique et l’éco anxiété sont des angoisses collectives tournées vers l’avenir, mêlées à un sentiment d’impuissance. Et les jeunes, quand ils parlent de ce qui les rend dépressifs ou les pousse à se replier sur eux-mêmes, parlent d’abord de souffrances vécues au présent provoquées par des proches identifiables.
Ce qui rend le raisonnement difficile c’est qu’aujourd’hui il est impossible de discerner le réel du virtuel puisque le virtuel fait partie du réel. Aussi, le rejet, la solitude, le harcèlement, la pression, ou les conflits familiaux sont des raisons de mal être dont le catalyseur et/ou le développement a tantôt pour origine le réel et le virtuel. Ce qui amènent forcément le doute sur les nouvelles technologies.
Peut-être serait-il bon d’interroger massivement les jeunes, tous les jeunes, même ceux qui vont bien ?
Nous pourrions mesurer auprès d’une majorité silencieuse :
– leurs capacités à être critiques ou à être influencés,
– leurs incapacité ou frustration à être privé de cette liberté de communication digitale entre pairs et sans supervision,
– les sujets et rhétoriques toxiques ou aliénantes auxquelles ils succombent, dans un parcours de construction identitaire fort, une culture en construction (parfois naïve, parcellaire et enthousiaste qui relativise l’esprit critique) et un corps en mutation (fatigue, hormones, etc.).
Ca semble être une bonne idée, mais attention ! Pour traiter un problème de santé publique ; s’intéresser à une majorité sans problème peut nous entraîner vers des résultats fallacieux. Car le coût pour le collectif d’un problème d’une minorité peut s’avérer supérieur aux bénéfices des usages faits par le plus grand nombre.
Jocelyn Lachance a récemment publié ses travaux sur les Jeunes et le Numérique, selon des entretiens avec des jeunes de classes moyennes et supérieures en France et au Sénégal.
De mon point de vue, l’étude socio-anthropologique de Jocelyn Lachance sur les « jeunes d’aujourd’hui » — qui révèle que la plupart d’entre eux se disent bien malgré des signes d’anxiété, — présente plusieurs aspects notables, et m’ont aussi apporté quelques réflexions, des questions laissées sans réponses.
Je trouve intéressant l’idée selon laquelle l’inquiétude serait comme un marqueur positif du grandir, et que les réseaux sociaux serviraient à la fois de refuge pour apaiser cette anxiété et pour renforcer une certaine résilience. L’idée que les jeunes s’infligeraient parfois la « vérité » en s’exposant à des contenus crus et souvent violents, afin de confirmer leur propre identité et leurs convictions, est particulièrement frappante. De même, l’observation que la colère peut définir le militant, et que la confrontation à la violence puisse rassurer l’adolescent sur qui il est, mérite réflexion.
Ces éléments rebondissent en moi, je me reconnais ou plutôt, je reconnais le jeune que je fut.
Cependant, je note avec un certain étonnement que Jocelyn Lachance n’incrimine pas directement les algorithmes ou la manipulation de l’attention. Le « doomscrolling » serait plutôt attribué à la société dans son ensemble et aux mécanismes psychologiques des adolescents, l’auteur ne semble pas vouloir pointer du doigt les industriels du marché de l’attention.
Selon moi, ce niveau d’analyse est potentiellement biaisé par le fait que l’étude repose sur des interviews de jeunes. On peut être conscient d’une forme de manipulation mais on ne pourra pas la définir tant qu’on aura pas les informations détenues par le manipulateur (Dissymétrie d’information).
La notion d’absence de « rituels oraculaires » dans nos sociétés occidentales modernes me paraît très pertinente pour comprendre pourquoi les jeunes gèrent leurs inquiétudes de manière isolée même si cette idée me parait assez abstraite.
L’idée de la sur-responsabilisation individuelle face aux défis, démontrée par l’atmosphère émotionnelle et la gestion des épreuves, sous-tend, je pense, une dimension politique, même si l’auteur ne prend pas position explicite.
Il y a dans ces travaux des éléments importants sur l’organisation sociale, comme le fait que les jeunes « passent d’espace en espace sans être signifiés (formés, informés, préparés) », le manque de valorisation des bonnes pratiques, ou encore la « souffrance par excès d’intégration » qui pénalise les plus vulnérables.
Bien que Jocelyn Lachance aborde la question des contenus perturbants et l’irrationalité (dualité) de les consommer, les solutions qu’il privilégie ne sont pas des réglementations externes ou gouvernementales. Il mise davantage sur des stratégies d’adaptation individuelles, l’accompagnement par les adultes, l’éducation, le développement de l’esprit critique et de l’autonomie des jeunes, et la création de nouveaux modes de partage et de régulation sociale. En gros, il mise sur la raison pour lutter contre des comportements qu’il décrit comme irrationnel. Ce qui me parait étrange, j’espère que j’aurais un jour l’opportunité d’en discuter.
J’aime les idées qu’il développe dans son ouvrage « Grandir inquiet à l’ère des réseaux sociaux » , c’est riche d’enseignement, et je déplore un cadre d’analyse assez réduit. Bien qu’il touche aux inégalités sociales liées au numérique, il ne permet pas d’intégrer la notion de lutte des classes, ni de solution pour lutter contre l’individualisme galopant (hormis les « rituels oraculaires »).
Je trouve que c’est assez caractéristique de notre époque et des possibilité de financement de la recherche.
Si 4 jeunes sur 5 se portent bien malgré des inquiétudes portés par les réseaux sociaux, pourquoi vouloir régulariser le marché ?
Peut-être que le problème n’est pas si grand, si important.
Les réseaux, comme le smartphone ne sont que les boucs émissaires, ce sont la partie visible de l’iceberg mais d’autre facteur sociaux ou environnementaux mériterait notre attention, voir une régulation.
C’est l’idée que je me fais du sujet : l’anonymat, la capacité d’influence, la liberté d’expression devrait peut-être être réserver aux adultes car ce sont pour moi des formes de jeux de hasard.


Car connaitre sur le bout des doigts les biais cognitifs n’empêche pas de tomber dans une arnaque utilisant des biais cognitifs.
Nous pensons savoir qu’il existe pour chacun d’entre nous un message, combiné à un instant et un environnement ; qui va user de notre fragilité au point où notre raison n’interviendra pas dans notre prise de décision. Ces combinaisons, associés aux algorithme de recommandation et aux phénomènes de viralité qui nous dépassent, forment le hasard du jeu : de l’engagement du simple Like jusqu’à l’endoctrinement.
Si l’on est conscient que des arguments rationnels ne peuvent empêcher des gens de jouer de l’argent, et que pour ces raisons, il est important de régulé le marché de jeux, alors nous devrions pouvoir réguler les réseaux sociaux pour les mêmes raisons.
L’addiction au sens médicale se joue sur simultanément plusieurs terrains : social, sanitaire et financier.
Un produit peut créer une addiction à partir du moment où :
– il peut ET entrainer une perte social (isolement), ET une perte financière (impact sur la carrière, dépenses inutiles), ET une dégradation marquée de la santé.
Le temps pris par une activité est pris sur un temps de socialisation ou de travail, sinon sur la santé (repas, sommeil, soins, hygiène, etc.).
Il faut que l’activité soit addictive à un niveau très important pour que ces 3 temps soient réduit à 0. Sachant que dans notre système informationnel, les RS peuvent être utilisé comme une activité sociale et/ou professionnelle, alors il est devenu impossible de dire qu’ils sont nuisibles sur ces 2 terrains.
Quant au 3ème ? Les médias s’accordent à dire que la santé est de l’ordre de la responsabilité individuelle, si votre cerveau et votre sociabilisation sont pris en otage au mépris de votre santé, c’est votre problème.
«Quand vous regardez une série sur Netflix et que vous en devenez accro, vous veillez tard le soir. À la marge, nous sommes en concurrence avec le sommeil. Et ça fait donc beaucoup de temps.»
Reed Hastings, P.-D.G. de Netflix, 2017
« Celui qui éduque le chien, peut lui apprendre à ne pas aboyer la nuit. »
Comment être certain que les industriels ne pénalisent pas les contenus qui prônent leur responsabilité et manifestent un intérêt pour des solutions collectives ?
Ce que l’on sait, c’est que les contenus misant sur l’action individuel, aussi bullshit soient-ils, sont bien viraux.
Alors, pas d’addiction pour les RS ?
Pour les RS, comme pour la lecture, les jeux vidéo ou d’autres loisirs sans impact direct sur la santé, il est difficile d’avoir les 3 pertes en même temps.
Enfin, je pense quand même aux infirmiers et aidants hospitalier antivaccins lors de la pandémie COVID. Je pense que certains ont perdu les 3 mais pas en Net, car ils se sont également faits des amis antivaccins ou ultra-libéraux. Ensuite, il est difficile d’établir les réseaux sociaux comme la cause de sa désinformation.
Le cas d’une infirmière anti vaccins morte du COVID.
Le vaccin ne l’aurait peut-être pas sauvé mais ce cas illustre bien comment des campagnes de désinformation propulsées par les réseaux sociaux peuvent influer sur la santé.
Et le cas de la France, ou les non vaccinés ont perdu leur emploi, montre que la désinformation peut entrainer des pertes financières. Enfin, les débats entre personnes ouvertes à être vaccinée et les personnes antivaccins ont bien eu des répercussion très clivante dans les familles et les groupes d’amis.
« Les gens qui travaillent dans le secteur de la santé ne sont pas à l’abri de ces mythes. Ils sont partout sur les réseaux sociaux. Nous devons continuer à rencontrer les gens là où ils se trouvent, à écouter leurs inquiétudes et à fournir de bonnes réponses. »
Dr Joe Kanter, responsable de la santé de l’État de Louisiane
Postface :
Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais !
J’ai beau enseigner l’éducation aux médias et les techniques de productions de contenus, mesurer ma responsabilité éditoriale ; je ne suis toujours pas à l’abri de me tromper dans une publication.
Lorsque je travaillais pour un grand groupe 🟧 ou pour l’Université, tout ce que je produisais été vérifié par plusieurs personnes. Maintenant ce n’est plus le cas et en juin 2025, j’ai partagé sur Facebook une information erronée. J’ai lu trop vite une page internet, j’ai confondu les 2 auteurs qui opposaient 2 opinions dans 2 sections différentes de la page. N’ayant pas interprété le saut de section en tant que tel, j’ai attribué à un auteur les propos de l’autre : c’est grave* et c’est problématique.
*sur le principe car dans les faits, des commentateurs m’ont rapidement corrigé.
Les problèmes en lien avec cette erreur de traitement et mes missions :
- Difficile de légitimer des critiques sur l’usage des Réseaux quand c’est « Le support de communication à privilégier pour faire de la prévention »,
- Je suis missionné pour partager et rédiger des contenus sur des sujets dont je ne suis pas expert (cf. ultracrépidarianisme) (Pour info, mes expertises sont la pédagogie, le marketing digital et les outils de création de contenus textuels),
- Je n’ai pas les moyens de passer trop de temps ou de faire relire tout ce que j’écris par un expert.
Les solutions qui me sont venues à l’esprit :
- Une solution serait de se remettre seulement à l’avis des experts nuancés, visiblement objectifs, de partager une parole vulgarisée sans esprit critique ou opposition (cf. l’ipsedixitisme).
- Une autre solution serait de vous partager des informations brutes, sans retraitement avec des points de vue opposés (cf. Curateur relativiste , Aggrégateur aveugle , Infomédiateur neutre).
- La dernière solution serait de m’investir à 100% et devenir d’ici 5 à 10 ans expert de la question. Mais cela ne m’intéresse pas, pour le salaire et les taches que j’exécute au quotidien, les avancées récentes des sciences sociales ne m’intéressent pas. Et d’un point de vue personnel, les publications fraichement établies et recommandées par la presse ont rarement passé l’épreuve du temps et l’épreuve des pairs. Je ne me vois pas consacrer mon temps de loisir à des lectures scientifiques dont les résultats seront potentiellement mis à mal à court terme.
Ces solutions ne me conviennent pas, je me rends compte des difficultés de mes nouvelles missions, étant donnée mon manque d’expertise sur le sujet. Preuve en est, s’il en est besoin qu’un professionnel sur les réseaux peut dire n’importe quoi et que même corrigé rapidement par la communauté, une partie du mal qui a été fait restera. Celles et ceux qui n’ont pas lu les commentaires, n’ont pas revue mon post après modification ou n’ont pas lu mon meâ-culpâ auront eu et garderont, si ils s’en souviennent, un mauvaise information.
Si, sur le principe, nous aimerions tous que chacun soit aimable, bienveillant, irréprochable sur Internet comme ailleurs, nous savons que nos différences (cultures, points de vue, intérêts) rendent cela impossible.
Alors pouvons-nous à l’heure actuelle se donner les moyens de sécuriser les utilisateurs sans créer de l’interdit et de la censure ? Devrons-nous nous en remettre à l’IA ?
Ce débat aura-t-il une fin ? Est-ce qu’un référendum ouvert aux mineurs pourrait chlore la question ?
Pour Arthur Grimonpont, ingénieur et consultant spécialisé dans les enjeux de transition écologique — qui détaille les biais induits par l’économie de l’attention sur la citoyenneté –, les alternatives (Prévention, éducation, plateforme avec contenu vérifiée ou sans recommandation algorithmique, etc. ) restent confidentielles dès lors qu’elles n’entrent pas dans cette économie de l’attention. Il faut donc encadrer le paysage informationnel (régulation).
Face à la désinformation, la polarisation du débat public, le dévoiement des élections, il faut passer par une solution collective.
Arthur Grimonpont
Selon lui, il est urgent de s’attaquer au modèle économique des médias sociaux : « Les obliger à basculer vers des modèles par abonnement » et « S’accorder démocratiquement sur le paysage informationnel » et sur « les règles de diffusion de l’information ».
C’est également le point de vue que je défends. Je ne vois pas pourquoi on peut supporter l’idée d’autoriser sur le marché un logiciel qui nous manipule pour nous faire perdre notre temps avec des contenus faux, clivant, dévalorisant, incitant à la sur-responsabilisation, etc.
Je vous remercie de m’avoir lu ! Vous méritez bien un petit sourire, je vous propose une petite blague d’un même ironique et péremptoire sur la question :

L’idée de ce même est pour moi soulever avec humour la problématique du déclin des activités possiblement offertes et appétentes dans leur environnement. Cependant, je ne doute pas que certain l’utilise pour dire que les RS sont mieux que rien, comme si l’être humain savait rester sans rien faire…
A bientôt, en Salle Info !
Je ne suis pas expert, je n’ai pas réponse à tout mais je peux toutefois vous aider :

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